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La Minute Spirituelle s'est arrêtée début octobre 2023. Ce site conserve les 320 vidéos publiées et leurs transcriptions écrites.
Aujourd'hui je vous invite à découvrir mon Journal d'un chercheur spirituel, où je vous partage mes réflexions sur la vie spirituelle et l'amélioration de soi, l'état de nos sociétés et l'urgence de bâtir un nouveau monde, les héritages sacrés et les nouvelles impulsions.
L'auteur : Jérôme Nathanaël

Jeûne et renoncement

Temps de lecture : 7 minutes
Jeûne et renoncement

Nos amis chrétiens, catholiques et orthodoxes, vivent actuellement la période du carême, qui s'étend durant quarante jours avant la fête de Pâques, et qui est marquée par des restrictions alimentaires plus ou moins strictes selon la tradition. C'est l'occasion pour nous de réfléchir à la relation entre le jeûne, le renoncement et la vie spirituelle. Faut-il vraiment réprimer les besoins du corps pour accéder à la dimension spirituelle ? Le développement spirituel n'est-il pas d'abord une ouverture de notre être limité vers une dimension plus large et une transformation de soi ?

Photo Somnath Das

Le jeûne et la santé

Aujourd'hui le jeûne, sous des formes très diverses, est tendance chez des personnes soucieuses de retrouver une vie plus saine, pratiqué pour éliminer les toxines accumulées dans le corps et ainsi renouveler sa vitalité. Certains privilégient des périodes de jeûne complet, par exemple d'une semaine, et participent pour cela à des stages ou rejoignent des établissements spécialisés, afin de bénéficier d'une surveillance adaptée. D'autres préfèrent le jeune alterné, le jeûne un jour sur deux, ou le jeûne intermittent, par exemple en sautant un repas par jour pour laisser 16 heures de repos au système digestif. Enfin la pratique du véganisme, aucune consommation de produits d'origine animale, peut également se rapprocher de cette préoccupation.

Mais si le jeûne et ses variantes sont de véritables outils d'amélioration de notre santé quand ils sont pratiqués avec intelligence et modération, ce sont également des pratiques millénaires qu'on retrouve dans toutes les religions du monde, considérées comme des moyens de se détacher de l'emprise excessive de la vie matérielle et de favoriser l'élévation spirituelle.

Le jeûne dans les religions

Dans le catholicisme les rigueurs du jeûne du carême, pratiqué en mémoire des quarante jours passés par Jésus au désert entre son baptême et sa vie publique, ont peu à peu fait place à de simples conseils de frugalité et à une recommandation de jeûne uniquement pour le Mercredi des Cendres et le Vendredi saint. Mais la période reste marquée par un souci d'amélioration de soi et de progrès spirituel, à travers le recueillement et la prière, l'introspection et l'examen de soi, et le renforcement du souci des autres.

Dans l'église orthodoxe il y a quatre carêmes, qui durent de 15 jours à plus d'un mois, le carême de Noël, le carême de Pâques, aussi appelé Grand Carême, le carême des Saints Apôtres, après la Pentecôte et le carême de la Mère de Dieu, en août. Ils sont marqués par des restrictions alimentaires proches du véganisme et sont des temps de préparation et d'approfondissement de la foi en lien avec les fêtes correspondantes.

Dans le ramadan musulman, quarante jours durant lesquels est pratiqué un jeûne sec du lever au coucher du soleil, on retrouve cette même notion de détachement des appétits liés au corps pour se concentrer sur l'approfondissement de la foi, la bonification de soi et du lien aux autres. Les différents jours de jeûne sec pratiqués dans le judaïsme, dont le plus célèbre est celui de Yom Kippour, le Jour du Pardon, mettent également l'accent sur ces aspects.

Dans l'hindouisme la pratique du jeûne est très présente et peut aller d'une légère privation jusqu'à l’extrême renoncement. Le choix des jours et la manière de jeûner dépendent de la communauté, de la famille ou de l’individu. C'est un acte moral et spirituel qui a pour but de purifier son corps et son esprit et d’attirer les bonnes grâces des divinités. Deux jeûnes sont plus généralement observés, Ekadashi, à peu près deux fois par mois, le onzième jour de chaque lune ascendante et descendante et celui lié aux célébrations en l’honneur de Shiva au début de l’année.

Selon la tradition, Bouddha a longtemps pratiqué le régime d'austérité stricte et de jeûne courant à son époque sans atteindre l'éveil. Après avoir abandonné cette pratique et s'être concentré sur la méditation, il a atteint la libération de la souffrance et le nirvana. Le jeûne complet n'est donc pas une pratique très répandue dans le bouddhisme. Mais on y retrouve le jeûne intermittent avec la suppression du repas du soir, par exemple dans le bouddhisme theravada, réputé proche du bouddhisme originel. Cette restriction permet là aussi de donner moins d'emprise aux appétits physiques en favorisant le détachement et la concentration sur les pratiques méditatives.

Le renoncement comme forme extrême

Toutes les traditions recommandent donc des restrictions alimentaires plus ou moins importantes destinées à favoriser le progrès spirituel en modérant les appétits du corps. Il s'agit soit de restrictions périodiques pour renforcer l'introspection et la pratique quand elles sont liées à des fêtes comme dans les monothéismes ou l'hindouisme, soit d'un régime alimentaire lié à une pratique comme dans le bouddhisme.

Cependant on trouve dans toutes les religions la figure plus extrême de l'ascète, qui renonce totalement aux biens et aux plaisirs du monde. On connait la tradition d'érémitisme des premiers temps du christianisme, où Antoine, Hilarion et de nombreux autres, se retirent dans le désert pour vivre dans la solitude et pratiquer la pauvreté, le jeûne et la prière.

L'Inde a une longue tradition de sādhus, en sanskrit «homme de bien» qui renoncent pareillement à la société et se déplacent sur les routes, se nourrissant des dons des dévots, pour se consacrer à atteindre la moksha, la libération de l'illusion (māyā), l'arrêt du cycle des renaissances et la fusion avec la conscience cosmique.

Un moyen parmi d’autres pour le développement spirituel

De la modération des appétits du corps à un renoncement complet à la vie matérielle, les êtres humains semblent donc avoir toujours perçu notre incarnation corporelle comme un obstacle au développement spirituel.

Cela a parfois donné lieu à des pratiques excessives qui sont plus comme une manière d'anticiper la mort qu'un chemin favorisant la vie de l'être humain intégral, réalisant ses potentiels spirituels dans sa réalité terrestre. Mais dans ses aspects les plus raisonnables, pratiquer des restrictions alimentaires périodiques, sous une forme ou une autre, présente l'avantage de nous dés-identifier de nos besoins corporels et matériels et de nous permettre d'apprendre à les assumer avec mesure et sans excès.

Si nous examinons les traditions, nous constatons la même volonté de maîtriser les autres dimensions de l'homme, perçues ici ou là comme un écueil dans la quête de la vérité et de la réalisation spirituelle ultime, en raison de leur mauvais fonctionnement.

Ainsi par l'usage de la prière, de la contemplation ou de l'oraison, la dimension émotionnelle de l'homme, capable d'émotions négatives comme la jalousie ou la haine, la tristesse ou la peur, est réorientée vers des émotions plus nobles comme la dévotion et l'amour du prochain. La pratique de la méditation ou le développement d'une réflexion métaphysique permet de lier l'esprit de l'homme à des espaces de conscience plus vastes et moins matérialistes.

Atteindre à la vie intégrale

En réalité l'homme n'a pas besoin de troquer sa vie matérielle et de renoncer à ses différents aspects contre une hypothétique découverte de la vérité ou l'accès à des niveaux de conscience plus élevés.

Il s'agit au contraire de réussir à être plus présent ici et maintenant à nous-mêmes et au monde, afin de prendre conscience des dysfonctionnements de nos différentes dimensions ou centres et de travailler à en réorienter les capacités vers l'usage positif pour lesquelles ils sont adaptés, afin d'en harmoniser le fonctionnement.

En libérant ainsi ses potentiels dans leurs aspects les plus sublimes, l'être humain devient capable sur cette base d'accéder dans cette vie à la vie intégrale et à l'éveil de ses dimensions spirituelles, l'amour inconditionnel et l'intelligence universelle.

© Jérôme Nathanaël

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